Pilules roses, de l’ignorance en philosophie

Juliette Ferry-Danini écrit un livre entier pour pourfendre le Spasfon, l’un des médicaments les plus inoffensifs qui habitent les étagères des pharmacies. Les Don Quichotte ont plus souvent aujourd’hui des jupons, mais leur bêtise toujours aussi stupéfiante, à confondre Big Pharma avec un moulin à vent.

Qu’est donc le Spasfon, sinon un excellent placebo, doté d’un faible effet biologique, pour les effets recherchés comme les indésirables, et d’un fort pouvoir d’auto-suggestion, qui permet d’éviter le recours à des traitements plus lourds.

Jamais la philosophe ne semble consciente de cet aspect du médicament, et probablement fait-elle partie de ces gens qui s’offusquent si on leur propose un placebo. « Ma douleur mérite un peu plus de considération !! », entends-je tonner cette “philosophe” qui a écrit son livre d’un jet après avoir subi la pose désagréable d’un stérilet.

C’est vrai, sa douleur mérite de la considération : la sienne, et les solutions qu’elle peut lui apporter en propre, avant de s’attaquer à la médecine et à l’industrie pharmaceutique. Car elle est équipée d’endorphines, de moyens de détourner l’attention de la douleur physique, de se l’expliquer, et ainsi d’en diminuer considérablement la portée, ne pas en faire une souffrance morale.

Mais Ferry-Danini a sans doute d’autres problèmes et ne sait pas ce qu’est un placebo. Son livre rate l’essentiel. Il torpille un produit qui ne fait probablement plus grande recette dans les comptes du laboratoire. Aujourd’hui le succès financier vient des produits réellement innovants et capables de combler un désert thérapeutique, comme le sémaglutide dans l’obésité ou les immunothérapies dans les cancers. Le Spasfon c’est de l’épicerie.

Nombre de placebos sont plus coûteux pour des effets encore moins perceptibles. Car si vous voulez qu’un placebo marche, vous avez deux approches : soit il existe un petit effet biologique ressenti et le cerveau sera conditionné à le reproduire et à l’amplifier, par sa propre action sur la physiologie. Soit il n’existe aucun effet décelable et alors il faut que le placebo soit très cher, imposant au cerveau de générer un effet quand même, au risque sinon de détériorer sa confiance en soi.

Toute l’enquête de Ferry-Danini sur le phloroglucinol, la molécule du Spasfon, est une lance dirigée contre les moulins. Évidemment qu’elle ne trouve aucune preuve scientifique d’efficacité sur le spasme : dans les études le placebo est presqu’aussi efficace que le Spasfon. Ce qui ne permet pas de conclure à l’inefficacité d’un placebo (donc du Spasfon) sur le spasme. Au contraire, le fait d’en vendre 25 millions de boîtes par an indique qu’il est remarquablement efficace… en tant que placebo

…et qu’il ne faudrait pas le remplacer par quelque chose de plus dangereux quand ce n’est pas nécessaire. Toutes les femmes ne sortent pas aussi chamboulées que Ferry-Danini d’une pose de stérilet. Devrait-on recourir à la morphine ou à une anesthésie générale systématique ? Ferry-Danini ne comprend rien au rapport bénéfice/risque, généralise à partir de sa petite expérience sanglotée.

Bref, ce livre appartient à la face grise du wokisme et non sa face rose. Ne vous méprenez pas sur le titre.

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