« Contre la toux persistante, mieux vaut… ne rien faire »
…relaie Science&Vie dans son numéro de juin. L’étude originale parue dans le Canadian Medical Association Journal indique qu’une toux chronique peut continuer chez près d’un quart des personnes après une infection respiratoire, pendant 3 à 8 semaines. Néanmoins en l’absence habituelle de signaux d’alarme pour une autre pathologie, les enquêtent montrent que les tentatives de traitement par corticoïdes inhalés, bronchodilatateurs et antitussifs oraux sont inefficaces. En plus les aérosols pressurisés émettent des gaz à effet de serre puissant ! Soigner sa toux n’est pas écolo. Conclusion : ne faites rien. Ça guérit tout seul.
Pas très charitable
Plongé dans les chiffres des études, on oublie facilement son rôle de soignant. La toux chronique est un symptôme extrêmement pénible. L’auteur de l’article l’a-t-il déjà éprouvée avant de lancer sa conclusion péremptoire ? Il n’est pas très charitable de laisser les autres s’en épuiser. Mais ce n’est pas le défaut le plus crucial de cette étude. Comme la plupart d’entre elles, elle n’est pas transdisciplinaire. En neurologie nous savons aujourd’hui qu’il existe un processus de sensibilisation des nerfs stimulés fréquemment. Ils fabriquent de nouveaux capteurs à leurs terminaisons. Conséquence: si vous n’êtes pas spécialement hypersensible d’un endroit vous le devenez au bout de quelques jours d’irritation. Augmenter la fonction développe l’organe. Le nerf enrichi en capteurs devient une vraie célébrité dans le système nerveux. Désormais il réagit fébrilement à tout stimulus.
C’est la raison pour laquelle certains enfants et adultes sont plus exposés à la toux d’irritation prolongée que d’autres. À la suite d’une infection virale particulièrement décapante pour le pharynx et la trachée, chez eux les nerfs locaux deviennent hyper-réactifs. Toute infection future même bénigne se met à déclencher une toux interminable et épuisante.
Comment se débarrasser du problème ?
Il faut stopper précocement toute excitation des terminaisons incriminées, suffisamment longtemps pour que le nerf perde sa richesse en capteurs et redevienne normalement sensible. Tout nerf peut être concerné. En rhumatologie nous utilisons par exemple la mésothérapie contre les névralgies chroniques (sciatique, cruralgie, névralgie cervico-brachiale). Elle consiste à faire un piquetage sous-cutané d’anesthésiques sur l’ensemble de la zone sensible. Une seule séance suffit parfois à faire disparaître une sciatique opiniâtre et désespérante depuis des mois. La cause initiale de la sciatique s’est estompée et la douleur est une séquelle de l’irritation prolongée du nerf, traduisant son enrichissement en capteurs. L’injection de son territoire, répétée éventuellement une à deux fois, déclenche une sorte de “reset” dans le système nerveux. Le nerf perd sa célébrité et ne s’excite plus sans raison valable.
Voici comment suivre le même principe pour une toux chronique. Cette méthode est très efficace, n’entraîne aucun effet secondaire, et est très respectueuse de l’environnement ! Demandez une prescription de Dafalgan-Codéine sous forme de comprimés effervescents. Dès le début d’un accès de toux, faites dissoudre un comprimé dans un fond d’eau. Un demi-comprimé peut suffire. Prenez une petite gorgée mais sans déglutir. Allongez-vous pour qu’elle baigne le fond de votre gorge. Il faut essayer de tenir le plus longtemps possible dans cette position, avant d’avaler ou recracher le liquide. C’est le plus difficile. Peu importe qu’une quinte vienne interrompre rapidement votre effort, vous essaierez de tenir plus longtemps à la gorgée suivante. La première aura déjà rendu votre fond de gorge moins sensible.
Il est permis d’avaler la gorgée pour augmenter l’effet avec un passage de la codéine ingérée dans la circulation générale. Mais ce n’est pas obligatoire, surtout pour ceux qui ont tendance à avoir un peu de mal de tête avec la codéine. Les effets secondaires restent bénins. Seules précautions : ne pas utiliser sur une toux productive, bien plus utile qu’une toux d’irritation et qui ne se prolonge pas. Attention aussi si vous êtes insuffisant respiratoire, évitez d’utiliser la codéine le soir et de l’avaler, pour ne pas réduire votre rythme respiratoire nocturne.
À mettre dans la pharmacie de secours
La codéine agit par contact direct. Elle anesthésie les terminaisons de vos nerfs hyper-réactifs. Reprenez-en dès le début d’une nouvelle quinte. Vous n’aurez pas besoin de continuer longtemps. La richesse en capteurs de vos nerfs pharyngés va diminuer. Pas de sensibilité anormale à la toux dans l’avenir. Le Dafalgan-Codéine peut être utilisé à la dose maximale de 2 comprimés toutes les 6 heures, mais cette limite n’est impérative que si vous les avalez.
C’est aussi un bon antalgique et j’en mets toujours un tube dans ma pharmacie de voyage. Ce n’est pas seulement soi que l’on peut épuiser avec une toux, mais aussi ses compagnons…
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Postinfectious cough in adults, Kevin Liang, Philip Hui and Samantha Green, CMAJ February 12, 2024 196 (5) E157; DOI: https://doi.org/10.1503/cmaj.231523
Dafalgan-Codéine cp effervescent sécable sur le dictionnaire Vidal